

MARGOTH 5
PDF5
WR
Roraima
Autoproduction
23 mai 2021 à 09:41:05
Dématérialisé
2021
13 titres. Durée: 57'49''
Une petite vidéo:
Roraima est un groupe du Venezuela, constitué de deux membres (donc, c'est un duo!), créé en 2014, portant le nom d'une montagne à la limite du Venezuela et du Brésil et pratiquant un black atmosphérique avec des sonorités typiques de l'Amérique du Sud, ainsi qu'une approche différant quelques peu. Le groupe chante en espagnol et puise son essence dans le folklore et la nature. Et ceci est son troisième album, contant une légende des Caraïbes. Le duo se répartit simplement les choses: un compose et fait tous les instruments et la programmation, l'autre gère le chant. Simple et efficace.
Après une intro titillant folklore et black metal, le duo nous propose les premiers titres qui rentre dans le gras du sujet. Il nous délivre alors un black atmosphérique rapide, avec des titres pouvant être longs (allant jusqu'à presque 10 minutes), lui permettant de déployer différentes facettes du black, alternant passages rapides et d'autres plus posés, servant de base à la création d'ambiances qui peuvent nous embarquer dans un univers qui transpire alors une vision musicale emplie de folklore vénézuélien. Si le contraste entre les parties rapides et les parties plus lentes pourrait choquer, il n'en est rien, le duo menant les deux aspects par un jeu de transitions intéressant .
L'aspect black metal est clairement assumé, jusque dans le chant, plaçant une voix criarde qui apporte un coté désuet qui colle avec la mélancolie qui suinte parfois des titres. Chant sur lequel je reviendrais un peu plus loin.
Car l'aspect intéressant que le duo propose est une approche parfois instrumentale, contrastant au niveau du son et des sonorités avec le black, via des instruments plutôt traditionnel, un peu comme Negura Bunget mais avec ici un coté plus agressif dans le black et usant l'aspect folklorique plus comme une trame musicale sur laquelle le groupe vient broder son univers, qui peut parfois être un peu déstabilisant, via des passages très différents par rapport au contexte mais qui prend tout son sens dans la globalité de l'album. Le duo sait où il veut aller et nous y emmène, nous dévoilant des aspects parfois étonnants (comme des sons naturels en toile de fond d'une ligne de guitare sèche par exemple).
Le duo s'appuie aussi sur la force des éléments naturels qui servent de relai à leur black metal assez modulé mais qui est parfois assez violent mais si le duo pratique la mesure de la retenue, jouant sur quelque chose entre émotion et ressenti face à la puissance de la nature. Et ça en devient très immersif. On s'approprie ainsi au fur et à mesure de l'album la vision que le groupe développe, malgré des différences parfois plus marquées que sur la globalité. Il y a une certaine grandeur à laquelle le duo semble porter un certain culte.
Il y a parfois des rythmiques qui s'éloigne franchement du black et qui semble aussi loin du folklore, venant peut-être d'une approche où les codes sont fusionnés, amenant cette complexité et ce coté un peu flottant, qui dure un instant, faisant alors lien avec les moments les plus aériens de leur musique.
Des titres sont purement instrumentaux et là, c'est direct: on est pris dans ceux-là, sans possibilité de fuite, dévoilant alors des titres épiques, très entrainants et vraiment efficaces. Et là, on comprend que le duo est constitué de petits malins diablement doués.
Si le folklore sert aussi de base, celui-ci est relativement imbriqué dans le black, permettant au groupe de créer une entité cohérente, même si parfois il y a ce coté un peu déstabilisant, tenu au fait de moments complètement à part et détachés du reste (mais toujours avec une cohérence globale. Rien n'est dû au hasard). Et cela permet au duo de pouvoir offrir de multiples visages à leur musique, nourrissant un black d'une essence que je fréquente peu en ce qui me concerne (et qui fait peut-être pourquoi j'accroche bien).
Le chant, essentiellement black, est très caractéristique, avec une voix criarde comme je le disais au début, renvoyant au black plus vers les années 90, quelque part entre la scène scandinave et certains groupes britanniques de l'époque. Mais le chanteur n'hésite pas parfois à offrir un chant très différent, utilisant alors un chant clair, dans des moments où la limite black et folklore est plus floue, offrant une ouverture sur des aspects à la plus oniriques et peut-être plus païen, proche d'un état d'esprit pagan. Quand le chant ne devient pas proche d'un chant ritualisé. Et qui lie ainsi le tout à la légende que le groupe développe sur cet album.
Le son est bon, malgré une différence de clarté avec les passages plus typés folkloriques, qui gagnent en netteté. C'est au début un peu étrange et ensuite, on se fait à cette idée, servant de ciment entre légende et peut-être par de vérité d'un mythe. Il y a aussi une différence de niveau entre les titres vraiment empreints de folklore et ceux typés black, avec un son alors un peu plus sale, jouant sur une certaine noirceur, qui s'avère au final logique.
En ce qui me concerne, c'est une bonne découverte et ça devrait intéresser pas mal d'amateurs du genre.