

MARGOTH 5
PDF5
Violate consensus reality
Psychonaut
Pelagic records
8 novembre 2022 à 15:12:09
CD Digipack
2022
8 titres. Durée: 52'52''
Une petite vidéo:
Psychonaut est un trio belge formé en 2013 qui n'a pas vraiment chômé depuis ces débuts, puisque pas moins de 4 Ep, un split et un premier album sont à mettre à leur actifs, œuvrant dans le post metal. Et maintenant, on peut ajouter cet album.
Je ne connaissais point ce groupe (il y a tellement de groupes dans différents registres que c'est impossible de tout connaitre) et c'est donc l'occasion de découvrir ce groupe.
Dès le début, le groupe va poser une atmosphère particulière qui sera la marque de l'album, jouant sur une certaine noirceur en même temps qu'il va proposer une polarité qu'il va exploiter. On retrouve ainsi un côté puissant, jouant avec les structures et les rythmiques, avec parfois des éléments un peu plus chaotiques et un côté plus mélodique, apportant quelque chose de plus que sa simple nature mélodique. Et la musique qu'il déploie est très dense, complexe et chargée de détails, qui jouent sur des contrastes, des tonalités variées et qui n'hésite pas à casser les codes définies.
Le groupe va ainsi rapidement tisser une trame où vont s'enchevêtrer les éléments, pour glisser souvent vers des idées intéressantes, cassant complètement les codes ou les repères que l'ont peut avoir par rapport au style dans lequel Psychonaut évolue. Et pour cela, le trio sort le grand jeu.
L'un des aspects important du groupe concerne le jeu des structures, se basant en partie sur les rythmiques. On retrouve ainsi un aspect chaotique, comme je l'ai dit, qui se retrouve dans des structures parfois alambiquées ou offrant un côté volontairement déstructuré, amenant dans l'atmosphère générale un sentiment diffus et flou, se posant entre une colère renfermée, un certain malaise mais aussi un coté onirique (j'y reviens plus loin). Les structures offrent ainsi des visages et des ambiances différentes, parfois de façon assez violente, mettant ainsi en exergue le côté puissant (pouvant développer une certaine violence dans le contexte). Cela est parfois fait de manière frontale mais le trio le fait aussi de manière subtile, jouant avec des transitions ou des passages changeant où la fluidité (et des idées comme des harmonies, des jeux d'arpèges, de changement de valeur ou de sonorité...) renforce l'aspect mélodique tout en offrant un reflet à la puissance que le groupe dévoile de façon subtile.
Les rythmiques sont ainsi ouvertes à une large gamme des possibles, pouvant offrir des moments assez posés avant d'amener quelque chose de plus puissant voir d'amener une certaine agressivité, un côté rugueux, qui permet au trio de donner de la texture ses titres. Si il y a des plages vraiment à l'opposé les unes des autres, il n'y a pourtant pas de pertes de repères car le groupe garde une cohésion complète à sa musique. On peut se retrouver avec des rythmiques plus binaires, plus proche d'un rock débridé qu'avec des rythmiques complexes, plus riches et cela, au besoin des évolutions des titres. C'est extrêmement riche et surtout, le groupe ne reste pas longtemps sur celles-ci, marquant sa volonté de variation et la polarité.
Les structures offrent ainsi des passages très différents, marquant de leur essences les titres et la façon de faire du trio. Et c'est dans cette voie qu'il offre la polarité à sa musique, lui permettant d'appuyer l'atmosphère te l'idée générale qu'il engendre sans risquer d'amener un coté rébarbatif. Et c'est d'autant plus malin, qu'il y a quelque chose qui rampe dans l'ombre, qui à un nom et qui est surement ce pourquoi l'album m'a accroché rapidement: le sludge. Le trio va ainsi jouer avec les codes et nos repères, déstructurant les codes justement et brouillant nos repères, pour mieux générer ses propres repères qu'il impose naturellement et nous amener l'essence de sa musique et de donner les clés pour saisir la musique. Et cette approche de déstructuration, quand elle rencontre un passage plus soutenu, glisse une subtilité qui n'est pas sans évoquer un côté noise. Cela permet au trio de pouvoir amener des choses contrastées, à priori incompatibles entre elles, au sein des titres, offrant différentes facettes et univers au sein d'un même titre (et qui pourtant s'avère indéniablement essentiel). Le sludge est là sans pourtant prendre une place démesurée, laissant les autres éléments s'exprimer librement et se trouver un point de fusion où la magie va se faire. Et c'est là que l'aspect mélodique joue sa carte.
Et la mélodie, le groupe la voit plus comme un vecteur que comme quelque chose qui pondère le coté plus brut qui peut exister. Et cela permet au trio de pouvoir glisser vers des moments où il peut y avoir une ébauche ritualiste, qui se ressent au travers de la musique, avec des strates hypnotiques ou répétitive, insistant ainsi sur l'atmosphère du titre, en même temps que celle de l'album (c'est à garder en tête ce point). C'est malin et ingénieux, surtout que le groupe va jouer sur d'autres aspects, dont celui que j'évoquais plus haut, avec l'onirisme. Il y a ainsi parfois des moments hors du temps et hors du disque qui arrivent, déployant une esthétique superbe qui vient sublimer l'ensemble où elle s'implante. Et ce côté onirique est poussé puisque le trio utilise aussi bien des riffs que les structures ou des rythmiques que l'usage d'une voix féminine et une ambiance plus exotique, quelque part entre l'onirisme pur et un aspect moyen-oriental. Et qui rejoint dans le même temps la polarité dont j'ai parlé, puisque s'opposant, tout en s'y mêlant, à la puissance et cette violence que peut déployer le groupe.
On retrouve deux chants (plus le chant féminin qui parfois vient se poser sur les moments oniriques) et là aussi, le trio casse un peu les codes. Un des chants est plus agressif, plus saturé, pour la teinte plus sombre et le second, plus posé, clair, servant à entretenir la bulle de l'atmosphère générale de l'album. Mais comme rien n'est simple ici, les deux chants peuvent se retrouver de façon simultanée, marquant une stratification des chants (qui fait le lien avec les strates présentes dans la musique). Et même avec ça, le trio arrive à encore offrir des particularité avec les chants, brisant parfois complètement les règles tout en gardant une cohérence avec l'essence de l'album. Il y a beaucoup de finesse, de subtilité et pourtant, il y a aussi un côté plus direct, presque celui d'un coup de pelle dans la gueule.
Le son est excellent. Il y a un côté un peu grumeleux, gras et pourtant, lorsque des choses comme des harmonies ou des arpèges arrivent, celles-ci sont très net, offrant un contraste à la musique et au son et qui entretient la polarité. Le son de la guitare et de la basse se recoupent souvent, pour le côté plus sludge mais se différencient fortement pour des moments plus importants, qui joue sur l'atmosphère ou le besoin des strates musicales. Et cette polarisation permet de lier les parties batteries à la trame de l'album, par le biais de la guitare et de la basse (et les 3 gars sont loin d'être des manchots).
Je n'aurai pas été spécialement vers la musique de Psychonaut. Et c'eut été dommage que je passe à côté de ça: une musique alliant puissance et beaucoup de finesse tout en posant quelque chose de plus grand, de plus intellectuel et qui pourtant dévoile aussi un aspect plus instinctif et qui est vraiment accrocheur. Merci les gars! Si vous êtes un peu curieux, ne passez pas à coté!