

MARGOTH 5
PDF5
The sixth extinction
Nothing but echoes
Autoproduction
10 novembre 2022 à 13:45:52
CD digipack
2022
8 titres. Durée: 51'13''
Une petite vidéo:
Nothing But Echoes est un quintet nantais de post metal (est-ce vraiment aussi simple?), papa d'un premier album nommé 'We I ARE' en 2018 et qui nous livre ici son second album, avec une trame loin d'être joyeuse.
L'album, autour de la sixième extinction (celle que l'on vit actuellement) s'ouvre sur un extrait du discours de Greta Thunberg qui met rapidement dans l'ambiance de ce qui sera la trame de l'album (la sixième extinction vu par une lointaine civilisation futuriste qui recueille des éléments archéologiques et des témoignages qui mène vers une inéluctable évidence). L'ambiance n'est pas à la rigolade, loin de là et la musique joue cette carte notamment (mais avec beaucoup plus de choses quand même). L'album est vraiment dense, avec beaucoup d'informations qui y sont enfermées et qui demandent plusieurs écoutes. Je me colle à la chronique, sinon ça va trainer trois plombes (déjà que j'accumule...).
Alors, effectivement, on retrouve des éléments qui sont lié au post metal mais là encore, Nothing but echoes est un groupe qui s'éloigne de ce que l'on peut en avoir comme idée (tendance qui voit ainsi émerger des groupes qui commencent à dessiner des contours d'autres styles). Mais ce qui marque surtout ici, en dehors de la construction des titres, c'est leur durée et l'approche plutôt progressive (avec des titres entre 6 minutes et pétant les 10 à l'aise), ainsi qu'un angle d'attaque particulier concernant l'aspect mélodique (car il y a un coté mélodique certain). Et c'est avec ses éléments principaux que le groupe crée sa trame, qui devient parfois propre au groupe, lui créant son particularisme qui s'exhale des titres.
Certains titres prennent ainsi le temps de se déployer, d'évoluer en leur sein, en se basant sur une ou plusieurs mélodies (qui peuvent prendre appuie sur la basse et des claviers subtiles), au sein de sous structures permettant cette évolution d'une structure principale. On trouve beaucoup de strates, qui sont à la fois libres et liées ensembles, créant une atmosphère très particulière sur l'album, entre mélancolie, colère et quelque chose de plus indéfini, comme une sorte de constat résigné doublé d'une lueur d'espoir diffus.
Il y a donc deux grosses facettes qui se détachent de la musique, à la fois lié au post metal et en même temps, qui semble la marque du groupe. Il y a ainsi une puissance qui est imprégnée dans la musique. Et elle peut s'exprimer soit frontalement au travers de passages pouvant générer de la violence, où l'agressivité prend le pas mais aussi de façon plus profonde, à travers les mélodies pouvant amener une puissance aussi bien dans des émotions que dans des évocations plus abstraites, les deux manières s'avérant redoutables. Il n'y a pas vraiment de polarisations du coup, plus une approche complémentaire, qui rend hommage à la musique. Un choix qui impacte la musique, de façon terriblement efficace.
Cela permet au groupe de pouvoir déployer des structures plus marquées, parfois très particulière, qui se ressentent dans l'approche dynamique et dans le jeu de la batterie, qui offre des passages assez alambiqués. Mais aussi d'amener ses strates que j'évoquais, qui parfois se chevauchent ou vont s'entrecroiser, créant des passages qui vont effleurer des ambiances et des univers bien plus subtiles que la première écoute dévoile. Il y a aussi ces moments où l'on découvre qu'il y a d'autres éléments musicaux qui sont incrustés dans la musique, que ce soit des plans jazz, des éléments évoquant le blues ou d'autres styles, qui jaillissent soudain à l'oreille, au long de différentes écoutes. Ca enrichit grandement les titres sans pour autour les alourdir, ces approches se retrouvant alors associées aussi au coté mélodique, qui amène la deuxième partie de coté progressif.
Le groupe a indéniablement le sens de la mélodie. On retrouve ça à travers les titres, dans des phases plus posées voire des passages s'éloignant des clichés habituel puisque le groupe va jusqu'à créer des trames plutôt atmosphériques où la subtilité rencontre alors la puissance de l'évocation ou la force d'un certain onirisme sombre. Car les mélodies font appellent à un coté mélancolique mais sans que ce soit la règle. Ca aurait pu être facile de ne faire que de la mélancolie mais le groupe explore les émotions adjacentes et livre ainsi des voies extrêmement intéressantes (et qui parfois flirte avec des choses improbables, comme cet emballement sur 'A perpetual denial' qui flirte avec une amorce de power violence dans une structure) et qui vont nous tenir en haleine, et ce de façon non artificielle.
Les mélodies s'émancipent en partie des règles car le groupe les amènes de façon parfois détournées ou par l'usage d'un instrument que l'on n'associe pas vraiment à cette aspect. Les guitares et le clavier, c'est assez logique, certaines lignes de basses, beaucoup moins. Et c'est là que ça devient assez fou pour ça, car le groupe va aussi créer des strates avec ça, en mêlant les instruments, tout comme les tonalités, les changements de gammes et autres trouvailles qui; là aussi, apportent de la densité, tout en gardant cette approche sombre, mélancolique mais avec cette lueur d'espoir, tout là-bas (sauf si ce sont les phares d'un camion, là on est mal barré, non?). Et au-delà de ça, il y a un travail sur l'aspect esthétique des mélodies (qui d'ailleurs amène un lien avec l'artwork, qu'on le veuille ou non). Les mélodies peuvent être tout en finesse, discrète ou s'élancer vers quelque chose de plus céleste mais sont parfois amener dans des moments très virulents, créant alors des moments à part mais avec une force évocatrice et émotionnelle incroyable (et on y retrouve donc la puissance, mais de façon détournée et avec deux pôles différents). Un moyen de boucler la boucle? C'est bien possible et c'est bien vu, en tous les cas.
Le chant est partagé entre voix claire et chant plus saturé mais avec l'éventail entre les deux qui est exploité, accompagné d'un second chant dans des chœurs qui peuvent être aussi bien dans des phases tout en subtilités que dans les moments digne d'un coup de pelle, amenant un ressenti différent en même temps que cette puissance émotionnelle. Le chant est traité comme partie intégrante à la musique et souvent, on retrouve une dynamique entre le chant et la batterie. C'est étrange mais c'est si naturel que l'on y fais pas nécessairement attention. Subtilité!
Le son est puissant, très propre, laissant s'exprimer les samples, les claviers, qui apportent leur dimension supplémentaire. La basse est bien présente, amenant son côté punchy mais aussi parfois ces moments où elle semble être l'origine d'une ligne mélodique. L'ensemble musique et chants est bien maitrisé, avec un mix équilibré, où les arrangements ne sont pas perdus dans des limbes.
Nothing But Echoes est une découverte savoureuse pour moi (merci Elodie!), avec une approche à la fois pour un public assez large sans renier pour autant le côté puissant, rageur, qui suinte de la musique. Le voyage temporel vaut le détour car l'album est diablement bien foutu! Foncez!