Unspkble est un groupe Montpelliérain ayant à minima 3 années d'existence (car déjà un Ep 'Friction' en 2020), qui œuvre dans un post punk, en plus d'avoir un nom à gagner au scrabble. Bon, post punk, évidemment, le groupe ne se borne pas à ça et ça complique la donne un brin.

Dès le début de l'album, le quatuor nous emmène dans les méandres du temps, quelque part entre la fin des années 70 et le début des années 80, avec un post punk qui m'évoque fortement Depeche Mode (pas trop de référence du genre en ce qui me concerne). Point de doute à avoir, puisque le groupe respecte les codes du genre, sans la moindre ambiguïté. Ce qui m'amène dans un univers qui m'est à la fois peu connu et pourtant qui me parle (du fait de mon âge). Le groupe nous envoie alors dans une sorte de nostalgie, de manière efficace et convaincante. Il est clair que si tu es fan de ce style, tu devrais clairement trouver ton compte, sans avoir à forcer le trait ou insister. Les repères y sont, avec les gimmicks du style, sa nature parfois dansante.
Mais le groupe trouve que c'est trop facile. Et il intègre venant d'autres sphères, comme de la new wave ou du goth rock. Et là, ça devient franchement intéressant. Car le groupe ouvre des champs du possible qu'il va prestement explorer et livrer des titres qui vont amener aussi bien des ambiances, des atmosphères liées à ce mélange que des changements de codes et une variété intéressante dans la construction des titres. Cela induit une énergie polyforme, qui donne des titres catchys. Mais le groupe ne s'arrête pas là.
Il propose une approche dans la trame des titres, injectant une lourdeur parfois très présente, amenant un côté plus sombre (faisant en partie lien avec le côté goth rock) mais dont le vrai but est d'éclairer les textes par un angle d'attaque différent, appuyant les propos des titres.
Et cela impacte la dynamique des titres, avec des variations de trame, un jeu sur les rythmiques (puisant dans les codes des styles), les tempos volubiles mais surtout une atmosphère globale qui s'avère singulière, en prenant des accents semblant parfois exotiques, musicalement parlant, en échappant aux règles définies et nous amenant dans d'étranges incursions.

Pourquoi étranges incursions, te demandes-tu peut-être d'une manière soudaine et anxieuse (tu te calmes s'il te plait). Et bien parce que le groupe intègre dans l'ADN des titres quelque chose qui s'exhale de la noise, induisant des moments très destructurés. Mais pas à travers une violence débridée mais dans le cheminement que suit le groupe depuis el début, jouant avec les sonorités, les riffs ou quelques frivolités rythmiques (parfois surprenantes et apportant encore plus d'intérêt). Et ces éléments noise viennent aussi par le biais des mélanges d'atmosphères et des styles, qui semblent pousser le groupe à aller plus loin, tout en cultivant un lien marqué avec le post punk. Mais cela passe aussi par ce côté catchy parfois plus décousu qui peut surgir au détour d'un titre, ajoutant une autre dynamique qui vient en complément, avec un autre niveau d'approche (plus rock parfois même proche du hard rock ('Struggle')) mais toujours lié à cet esprit post punk.
Et on a beau parlé post punk depuis le début, il y a pourtant, derrière les titres et dans l'approche musicale du groupe, appuyé par une certaine urgence qui suinte parfois, en plus de la conception incluant des éléments noise, quelque chose de clairement punk. Pas vraiment dans la musique mais plus dans l'attitude ou l'exécution de la musique. Mais ce punk se dissimule derrière le reste, ne s'offrant que rarement à notre compréhension, pour mieux appuyer sa nature (le groupe ouvrant un contraste net mais réfléchi). Et qui est, finalement, assez logique dans ce qui découle de l'album (et de l'origine du post punk).
Et c'est logique aussi car l'album amène une atmosphère assez sombre, associée à la lourdeur et le groupe s'offre ainsi un moyen de lié le tout, tout en nous emportant avec lui dans sa vision affinée de la musique.

Pour le chant, le groupe ne fait pas dans la facilité ou la simplicité. On a trois chants, offrant tout à la fois complémentarité, contraste et différentes tonalités qui apportent de la densité dans les titres, Mais ils participent aussi à l'atmosphère de l'album et ce côté un peu nostalgique, marqué dans la voix de Dion, m'évoquant Depeche Mode (oui, il doit y avoir pire en évocation), avec un timbre qui fait assez crooner. Mais les chants jouent aussi avec les autres styles qui sont imprégnés dans les titres, glissant nos repères vers parfois quelque chose de plus chaotique (de manière sage, faut pas déconner non plus).
Le son est excellent car d'emblée, il nous emmène vers le passé et l'évocation du style. Il y a un côté un peu désuet peut-être mais foutrement cohérent. Les instruments sont tous bien présents et la basse est bien audible, apportant ce côté catchy et une certaine profondeur. Le clavier se manifeste au besoin, de manière soit discrète soit plus directe, apportant une part de l'identité du groupe. Il y a une réflexion avec les arrangements, qui peuvent traverser les styles, en toute cohérence. Les chants sont bien clairs, audibles, avec un choix de les mettre très légèrement en retrait, manière d'appuyer à la fois la nostalgie mais aussi l'identité du groupe.

Unspkble est une découverte pour moi, n'étant pas un aficionados du post punk. Le style en lui-même ne me posant pas de problème, c'est un style que je trouve digeste. Mais avec ce groupe, le style est transcendé car Unspkble ne se limite pas aux seules limites du genres et va exploser celles-ci. Et ça vaut vraiment le détour!