MARGOTH 5
PDF5
Lifeline
Uncomfortable Knowledge
Autoproduction
29 juin 2024 à 09:51:36
CD digipack
2024
10 titres pour 45'14''
Une petite vidéo:
Uncomfortable Knowledgeest un groupe nîmois œuvrant dans un mélange savamment étudié de post hardcore, de sludge et de post metal, dont le dosage varie un peu selon les titres de ce second opus que nous livre le groupe et de pouvoir voir l'évolution avec 'Black Queen', leur premier effort (que tu vas aller écouter si ce n'est pas encore fait).
L'album s'ouvre sur 'The earth' qui va poser d'entrée une modulation plus marquée des styles que le groupe s'offre en mélange. La modularité et un côté plus sombre sont les clés de cet album, qui s'expriment dès le début, par différents moyens.
On retrouve l'identité du groupe, caractéristique, dès les premières notes et celui-ci nous plonge directement dans l'univers et la thématique que l'album va explorer. Il est la suite logique du premier album, explorant cette fois plus les aspects de la vie, quelque soit ces moments, même tristes mais avec l'idée de profiter de chaque instant. Ce qui est le sujet de chaque titre, abordant un aspect spécifique. Et là, la partie simple est terminée, on attaque plus complexe. Parce que l'album est très dense et que, même après de multiples écoutes, il y a encore des choses à découvrir.
D'abord, musicalement. Si, comme je l'ai déjà écrit, on retrouve ce qui fait UK et une évolution sur la modularité, on découvre de nouveaux aspects, qui viennent en appui pour créer des atmosphères, souvent sombres (je vais développer ça un peu plus) mais aussi en matière de rythmiques (qui suit cette modularité), où le groupe va intégrer quelques aspects différents, plus innovants. Si on reconnait UK dans la forme, le fond est, pour moi, plus sophistiqué, ce qui le rend plus axé à la fois sur les émotions mais aussi la réflexion (associée aux textes).
Parmi les nouveaux aspects, il y a l'intégration d'instruments comme un violon, une trompette ou du trombone, qui engendre des structures sombres mais avec un côté chaleureux et humain (qui fait le lien avec le thème central de l'album), s'offrant au passages des moments de sérénité ou d'une approche plus céleste, s'axant vraiment sur la part émotionnelle, qui prend toute sa puissance alors. Cela amène aussi une approche d'écriture un peu différente, avec par exemple des passages où le staccato est présent, ouvrant ainsi à la fois du contraste ou au contraire un appui au contexte où celui-ci s'exprime.
Avec ça, il y a des moments où le tempo est très ralenti, amplifiant l'aspect sludge, et va mener à une évolution de celui-ci en plaçant des moments où le rythme introduit des phases de silences régulières qui font partie intégrante de la rythmique (très marqué su' An empty heart can't break'), faisant un lien avec l'émotionnel et l'organique et conservant toujours cette approche philosophique de profiter de la vie. Cette approche des tempos (et plus globalement des structures rythmiques) marque une évolution certaine qui implique que le groupe change son approche aux styles de bases qu'il brasse, non s'en amener parfois des moments où quelque chose de différents apparait, comme cet ajout quelque part entre musique classique et AOR, dans des phases lentes et mélodiques.
Le rythme global de l'album est aussi plus lourd, marquant cette part d'obscurité. Le groupe abonde dans un rythme maîtrisé, qui vient ajouter son esprit à la teneur plus sombre et en retenu de l'album. Le sludge est alors vraiment intégré à un post hardcore (on pourrait même parler quelques fois de post beatdown, oui!), gardant en ligne de mire cette volonté de mélodie et de retenue, tout en sachant nous offrir des moments plus détachés et fougueux, offrant un contraste intéressant, très cohérent. Mais on a aussi des éléments purement post metal qui s'exprime, dans des structures, des phases plus précises ou même des éléments du chant. Mais UK sait aussi offrir des phases très tranchées à chaque titre, jouant sur la mécanique des rythmiques revêtant différents oripeaux, pouvant être lents, plus typé hardcore ou même martiaux.
Cela amène des structures variées, très denses ou au contraire plus légère, marquant plus certains titres que d'autres, en jouant sur ce qu'évoque le titre Et c'est là que le groupe nous offre un jeu des structures très sophistiqué, offrant une complexité présente qui n'est pas outrecuidante et qui permet à UK de pouvoir explorer différents aspects et nous amener quelques passages ultra savoureux, qui ne sont pas du tout attendus.
Cela passe par différentes transitions, certaines comme sur le premier album (comme des breaks, des changements sur quelques mesures) et d'autres plus innovantes, jouant sur les modulations ou encore le glissement vers une hybridation de style, toujours avec cette idée de lier l'émotionnelle et les atmosphères.
Les atmosphères sont sombres mais n'ont rien de négatif. Ca peut évoquer une certaine nostalgie, une légère mélancolie mais toujours avec quelque chose de positif et d'humain derrière, posant une approche sombre chaleureuse (et qui est raccord avec la tonalité de la musique). Le violon, la trompette ou le trombone sont des moyens d'amplifier cet aspect sombre, associé alors avec une rythmique spécifique et un jeu de la basse qui est différent, glissant une modularité du jeu du bassiste, à la fois surprenant et tellement logique et raccord avec le reste (et qui est aussi une évolution avec le premier album, le bassiste s'offrant une liberté de jeu). Les atmosphères offrent aussi un aspect modulé, n'étant pas linéaires. Si l'ensemble est sombre, il y a vraiment une volonté d'avoir ce puissant côté humain qui imprègne la musique. C'est là qu'il est utile d'évoquer les tonalités des guitares, assez différentes dans les titres, car jouant à la fois sur les structures et les atmosphères qui imprègnent l'album. Cela induit un travail de réflexion et d'écriture assez marqué et qui nous offre une preuve de plus de cet aspect plus sophistiqué.
Cela tient du fait que l'album aborde des thèmes forts, liés à la vie et aux interactions entre les personnes, mais avec un point de vue plus philosophique qui s'exprime, induisant forcément une réflexion allant au-delà de la musique car nous impliquant dans cette réflexion. Pour cela, le groupe utilise les mécaniques déjà citées mais glisse en plus une approche non dénué de poésie (que ce soit par les mélodies ciselées, le choix des tempos, des moments suspendus ou même du chant lui-même, et d'autres en plus). L'album évoque ce qui fait une vie, de manière symbolique ou philosophique mais avec la facilité de compréhension, à travers des titres puissants, musicalement (quelque soit la forme) ou émotionnellement, de manière brillante, sans le moindre doute. Et c'est là, à mon avis, que le groupe va le plus loin, avec les textes, qui font clairement la suite du premier album, mais avec cette volonté d'explorer plus profondément les aspects évoqués, mettant en valeur certains moments forts avec les interactions que cela implique (passant par la naissance, la perte d'un parents, le deuil, la mort et ce qui va au-delà, avec le souvenir, la marque que laisse les disparus dans nos cœurs et le temps qui passe (d'où très surement le titre 'lifeline'). Et qui est, aussi étonnant que ce soit car l'album étant sombre, une célébration de la vie où l'essentiel est de savourer chaque instant car même les plus tristes dégagent quelque chose de beau ou de positif à un moment et qui va prendre le dessus sur ça.
Et c'est là qu'il faut bien parlé de l'artwork, juste sublime, qui souligne cette approche, ouvrant un artwork en 4 parties, avec une évolution de celui-ci en 4 tableaux, évoquant le moment présent, le souvenir par l'artwork sépia puis le souvenirs avant celui de l'imprégnation dans le cœur (plus puissant que les souvenirs, avec ce côté vaporeux) puis celui de l'esprit, aux souvenirs plus forts, qui ne laisse pas de traces extérieures. Mais là, il est possible que le groupe me corrigent et que mon interprétation ne soit pas totalement correct, une partie symbolique existant.
On retrouve ce chant caractéristique, offrant là aussi une puissance moduler dans le fond et la forme, posant des éléments très émotionnels. Le timbre est toujours chaleureux mais va plus toucher l'âme, sortant des sentiers battus plusieurs fois. La retenue est là, tout comme sa libération dans des moments plus vifs et énergiques. Le chant va aussi explorer de nouveaux horizons bienvenus, s'offrant une ouverture dans la continuité du premier album. Très à l'aise, le chanteur s'offre clairement un moment de plaisir (et à nous aussi du coup).
Le son est excellent. La puissance qu'il offre est protéiforme, dans le son en lui même, les tonalités, le jeu des effets ou les placements des instruments secondaires. Les instruments sont tous parfaitement audibles, avec un travail des arrangements très soigné, pour une immersion complète. La basse est très présente, offrant des jeux différents (et donc un travail sur al tessiture et la tonalité, selon les besoins), avec des guitares qui suivent aussi cette idée. La batterie offre un son net, avec des toms plus dans les graves, pour lié la musique à ce côté plus sombre. C'est extrêmement réfléchi sur l'aspect du son, avec un travail là encore en profondeur.
Uncomfortable Knowledge nous livre un second album massif, où la puissance est dans différents aspects, pas nécessairement juste musical. Si tu as aimé le premier album, alors vas-y fonce, celui-ci va plus loin tout en gardant l'identité du groupe. Et tu ne peux que passer un excellent moment à chaque écoute qui révèlera des aspects différents, du fait de sa densité. Une véritable pépite que les gardois nous offre!