

MARGOTH 5
PDF5
Haine
The butcher's rodeo
At(h)ome
23 décembre 2021 à 15:51:06
Dématérialisé
2021
12 titres. Durée: 43'41''
Une petite vidéo:
The Butcher's Rodeo est un groupe parisien dont voici le 2è album (après un premier album précédé de 2 Ep) évoluant dans ce qu'il nomme le hobocore. Pourquoi? Qu'est-ce que c'est? Qui? Où va le monde? La petite Lucette retrouvera-t-elle ses lunettes de myopes? Tant de questions, dont les deux dernières ne sont pas vraiment des plus pertinentes.
Hobocore, veulent-ils faire une référence à la vie de musiciens, qui ferait un truc accès hardcore? La vie de vagabond dit saltimbanque offrant une musique agressive? Ou bien un moyen de faire parler d'eux et de mettre un nom sur quelque chose d'hybride?
Haine s'ouvre sur le titre 'sans sourire', très mélancolique mais avec une colère chargée derrière. Le titre, à la mélodie vicieuse, se grave directement dans ta tête, accompagnée de paroles simples mais forte. Et ce qui va suivre ce titre, c'est entre colère et constat, le long des 11 titres qui suivent. Et ce qui est certain, c'est que deux éléments dominent: ça dépote, avec une section rythmique de tarés, posant des bases qui prennent au hardcore le coté puissant et agressive (en plus de certaines caractéristiques) et il y a un aspect mélodie qui sert d'appuie à un ressenti émotionnel. C'est un constat qui se fait sur la totalité de l'album.
Et c'est sur ces bases que le groupe construit sa musique, y ajoutant des éléments venant d'autres sphères (peut-être vers le neo à la française notamment? C'est un peu flou pour moi mais bon, ce n'est pas grave, ça le fait) mais gardant en ligne de mire ce coté brute, cette colère aux formes multiples. Car le coté rythmique en impose, avec des rythmes soutenus, tout en offrant une variations de ceux-ci, donnant des phases plus posées, en contraste avec l'ensemble. L'aspect hardcore y est très présent, le groupe n'hésitant pas a y poser des rythmiques qui prennent un coté martial parfois, aspect revenant cycliquement quelques fois, servant à la catalyse de cette colère froide.
Le groupe joue avec les rythmiques, posant des règles qu'il n'hésite pas à exploser aussitôt, amenant une approche simple et un peu folle: se jouer des règles imposées, prônant ainsi à travers ça une forme de liberté. Et cela va donner quelques moments un peu fou comme un rythme qui ralenti sur plusieurs mesures, en total contraste avec le reste ('Mensonges'), qui appuie ainsi malicieusement le nom du titre. Il s'y développe des rythmiques où la subtilité est un nécessaire, ce qui se lie au coté mélodie.
Car l'album, même si puissant et assez rentre dedans, dispose de charges mélodiques massives ultra efficace, venant en contrepoint de l'aspect brute et du tempo rapide qui peut être dominateur. Et les mélodies qui se développent ne viennent pas détruire ce coté brut et cette colère. Bien au contraire, même si c'est un contraste, ça vient appuyer cette colère, qui au fil de l'album prend peu à peu un coté résigné et une forme de prise de décision.
Et oui, il semble qu'il y ait une progression dans l'album, aussi bien dans la forme musicale (avec parfois un inversement progressif des répartitions des formes musicales), faisant alors comprendre qu'il y a quelque chose de plus profond derrière. Et c'est lié aux paroles.
Car les paroles sont en français, offrant le bonheur de comprendre directement celle-ci (qui plus est, qui sont pertinentes), offrant une sorte de catharsis, d'où l'explication de la colère sous diverses formes que l'on ressent. Les paroles ressemblent furieusement à un gros glaviot lâché à la face de la société, qui n'en qu'un décadence systémique dont les maux sont dépeints à travers les titres, par le prisme d'un individu résigné. C'est foutrement immersif du coup, chacun pouvant s'y retrouver un peu.
Et ce qui nous mène au chant de Vince (Aqme, pour ceux qui ont écouter le groupe, eux seuls savent si le chant est pareil, j'en ai aucune idée...). Celui-ci offre un chant agressif où parfois il apporte une modulation et une finesse, jouant sur la carte à la fois de la colère, de la mélancolie (plus subtile) et offrant un chant qui va jouer sur la carte de l'évolution des titres, tout en gardant la cohérence de la base. Il y a beaucoup de subtilité même quand il offre un chant foutrement agressif.
Le son est juste énorme. La section rythmique est bien présente, forcément, mais sachant laisser la place aux autres instruments, ainsi qu'à certains plus ponctuels comme un clavier. Il y a un lien entre le son, la musique et la couleur de l'aura du disque. La basse s'entend, bien calée avec les parties batterie, offrant une grosse profondeur sur cet aspect rythmique. C'est très percutant, tout en offrant une certaine finesse, lié à la mélancolie discrète. Là aussi c'est bien vu!
Je ne connaissais pas du tout The Butcher's Rodeo. Et je ne peux que le conseiller, celui-ci faisant la part belle à la puissance et à un jeu d'émotions négatives transformées en quelque chose de plus positives. Franchement, si vous ne connaissez pas, vous ne serez pas déçus!