MARGOTH 5
PDF5
Gravitasjon
Askemåne
Autoproduction
10 octobre 2024 à 15:00:37
Dématérialisé
2024
11 titres pour 54'38''
Une petite vidéo:
Askemåne est un quatuor de Besançon formé en 2021, d'abord sous forme d'un duo qui s'est étoffé par l'arrivée d'une soprano et d'un batteur. Le groupe évolue dans un neo dark folk, étiquette qui n'est aps la plus simple à comprendre. Heureusement que la musique aide.
Il faut regarder du côté de groupe comme Heilung ou Wardruna pour te situer un peu plus facilement où se situe le groupe. Alors oui, on est très loin de musiques plus conventionnel mais c'est aussi un style que j'apprécie, Heilung en tête.
Le groupe propose des titres reposant sur une base plutôt cérémoniale / rituel, constitué de chants de gorge et de percussions (parfois très recherchées) sur lesquels arrivent des mélodies (dans la lignée des percussions), un chant féminin (offrant plusieurs aspects) et une partie rythmique complexifiant l'aspect percussion. On est sur des titres paraissant simple mais recélant une profondeur et une complexité assez marquée.
Le groupe nous embarque ainsi dans une approche posée, plaçant une atmosphère très singulière, s'appuyant sur le shamanisme (et on retrouve quelques éléments présent aussi chez Wycca) où l'essentiel se concentre sur l'atmosphère et le rappel de la nature ainsi que cette essence plus spirituelle, créant une entité vaporeuse se basant sur cette atmosphère évoquée. Ce n'est pas évident à traduire en mots ce qui est plus un concentré de ressentis et d'émotions, axé sur cet axe shamanique que le groupe explore. Si Heilung ou Wardurna sont des évocations, le groupe va quand même explorer une autre voix, faisant une ouverture vers des évocations plutôt scandinaves, entre les titres dans une langue un peu floue pour moi (aucune idée de son origine) et un peu de français.
Le groupe adopte une approche posée, presque méditative (offrant un moment de sérénité avec cet album), permettant d'offrir une voie d'évasion changeant des modes habituels. Mais cela ne l'empêche pas d'explorer des ambiances différentes en variant la forme structurelle des titres (on garde une base qui s'avère volubile), offrant une immersion nette et permet aussi de transmettre à certains passages une énergie puissante, sans avoir recours à quelques tricheries. Tout se fait avec la base évoquée plus: percussions et voix de gorges, le tout habillé.
En aucun cas le groupe n'utilise de subterfuges, évitant les écueils de la facilité. Car même si cela serait plus simple pour arriver à ce qu'ils veulent, la dynamique serait brisée et l'immersion s'évaporerait, sans compter que l'aspect shamanique et cérémoniel perdrait de son impact voire deviendrait juste un aspect théatral dénué d'intérêt.
Le tour de force est que justement, le groupe maitrise la manière d'intégrer les autres éléments, ces derniers apportant une profondeur et une part d'importance qui les lie au reste. Car Askemåne gère vraiment cet aspect crucial, qui est la clé de l'immersion et un peu d'une sorte d'envoutement, nous emmenant aux confins du rêve éveillé, de l'onirisme et de la spiritualité - du moins, de la manière que l'on conçoit cette dernière.
Il y a forcément, du fait du style et de la base, des phrases musicales qui reviennent. Ce n'est pas redondant, loin de là. C'est un point essentiel qui tisse une trame cohérente au sein de l'album, permettant à chaque élément d'avoir sa place au cœur de quelque chose de plus vaste, en liant avec l'aspect chamanique et spirituel. Et cela est assez étonnant, car les titres, bien que partageant du coup des structures pouvant être identiques à d'autres, l'ennui n'est pas là et on est étonné de commencer l'écoute et que, lorsque l'on regarde où l'on en est de l'album, on a fait un bond de géant dans les titres.
Et cela vient de la mise en place des autres éléments, comme les mélodies, le chant féminin ou les patterns de la batterie. Ces derniers jouent souvent en écho aux percussions mais offre aussi, ici et là, une sorte de décalage complémentaire qui ouvre la voie à une lecture sur deux niveaux, changeant le prisme de la compréhension.
Dans ces moments, chant de gorge et chant féminin dévoilent alors d'autres aspects, tout aussi subtils mais qui vont vraiment poussé au sublime, offrant des plages oniriques qui nous sortent du temps. Le tout s'appuyant sur la finesse des mélodies mais aussi les circonvolution que le groupe crée, glissant des aspects modernes qui renvoient à un imaginaire collectif et un partage conceptuel. Et pour appuyer cela, le groupe a aussi recourt à des sons naturels, ajoutant encore plus de cohérence et de densité à sa musique.
On a deux types de chants sur l'album: un chant masculin, (axé principalement sur le chant de gorge, renvoyant directement au shamanisme (mais aussi à quelque chose de plus symbolique, dans le traitement parfois amené)), posant les bases essentielles (et sortant parfois des chants de gorges, offrant un autre angle) et un chant féminin, jouant sur la carte de l'éthérée ou pour amener un autre point de vue musicale, les deux aspects offrant une complémentarité totale. Il y a beaucoup de finesse, de la subtilité et cette ligne fluide liant les deux. Les deux sont essentiels à l'immersion.
Le son est excellent. Le traitement offre une grande profondeur, avec un mélange subtile des divers aspects, associé à un côté résolument moderne. L'émotion est au cœur du son, avec une mise en avant des percussions et de la batterie, ainsi que des chants de gorge. Mais les éléments plus oniriques ne sont pas en reste, n'étant pas juste un habillement dans le son. Ils apportent une part essentielle à la compréhension et à l'immersion. La modularité des chants, avec la musique est très présente et somme toute logique dans l'approche du groupe.
Askemåne livre un premier album sublime, très réussi, qui nous ouvre un univers puissant et un potentiel qui va se développer, en même temps que sa musique. Si tu es une personne curieuse, fais l'effort, ça vaut vraiment le détour.