

MARGOTH 5
PDF5
Egregor
Grandiosa Muerte
Bitume Records
12 mars 2023 à 14:31:46
CD
2023
8 titres. Durée: 31'20''
Une petite vidéo:
Grandiosa Muerte est un one man band du Costa Rica, derrière lequel sévit Max Gutierrez (aka Hermés), fondateur de Ravensouls, December's cold winter, Advent of Bedlam. Ce qui fait quatre groupes de diverses obédiences.
Ici, on a affaire à un death intense. On a de suite une certaine lourdeur, notamment à travers le son, qui renforce le côté percutant du death mais un death qui change un peu la donne, sans doute dû à l'origine géographique. Car ce death a quelques petites accroches singulières, qui vont rapidement être la marque de fabrique.
Il y a déjà une certaine lourdeur (que j'évoquais à travers le son) qui s'exprime à travers les rythmiques (soutenues mais qui peuvent singulièrement ralentir le tempo et ployer vers quelque chose de plus sombre, poisseux). Cette lourdeur est l'un des éléments clés du death de Grandiosa Muerte, en plus d'une approche qui est plus primitive, lorgnant vers un death brutal puisant dans les origines du style, avec un côté un peu sale.
Cet aspect dégage un côté assez malsain (que la lourdeur amplifie) et insuffle une synthétisation et une polarité des éléments, collant avec le thème dans lequel évolue les titres (les forces occultes altérant l'égo). Ce côté malsain ressort aussi dans le son et les structures, très particulières, qui peuvent soudainement jaillir sans crier gare, toujours dans un contexte de rythmiques soutenues. Mais ce côté malsain embraie aussi avec un aspect intéressant car s'éloignant des conventions du style. Car il y a un aspect là aussi important, prenant la forme d'une approche plus synthétique.
En effet, à l'écoute, il y a des relents étranges, évoquant une injection d'un indus brutal dégénéré au sein du death à l'aspect primitif que nous propose Hermès. Elle s'exprime aussi bien à travers une partie du son que par les structures des titres, qui vont alors offrir une certaine répétition, voire même une redondance (clairement assumée car essentiel) qui sert à nous plonger dans une ambiance singulière, malsaine et à donner cette curieuse impression que l'on se perd dans les méandres d'un esprit d'un cerveau malade, hanté par des esprits plutôt retors. Et cela fait qu'il y a quelque chose qui se génère sur la totalité de l'album.
Ce côté synthétique explose ici et là, à travers certains riffs mais surtout sur la basse, qui parfois change de destination et prend un rôle différent, devenant presque une entité à part, qui marque une différenciation avec la batterie (qui elle est sous acide, à minima). Et cet aspect synthétique amplifie le côté brut et l'impact du death, jouant aussi la carte de la désincarnation et d'une approche d'inhumanité.
Hermès nous plonge dans un cauchemar, à la lisière de la métaphysique, de la psychologie et de la limite entre monde réel et fantasmé (mais dans le plus sens le plus glauque). C'est là que l'on mesure vraiment l'impact des titres, à travers des boucles de rythmes, des riffs pouvant être entêtant, d'où cette redondance et cette répétition qui apparait. Si les titres peuvent avoir des ressemblances entre eux, c'est pour mieux nous enfoncer dans cet univers malsain et primitif, où le death libère une intensité et une lourdeur qu'aucun temps mort ne vient perturber.
Car ici, point de temps mort (ce qui est cocasse pour du death, non?) ni de rupture de tempos: point de break, point de répit. Les titres déploient une intensité de bout en bout, sans vraiment laisser le temps de respirer, esquissant parfois une amorce leurre d'un break qui n'arrive pas. Hermès joue la carte du malsain à fond, sans laisser un seul instant notre attention se détacher de la musique. C'est quelque chose qui marque de son empreinte la musique, en même temps que notre esprit.
Il cultive un côté primitif qui sied parfaitement à ce qu'il propose mais sans renier notre époque, installant des repères tangibles et temporels qui viennent à la fois apporter un point de convergence et en même temps nous perdre dans les méandre de la folie sous jacente qui anime l'album.
Car oui, clairement, il y a quelque chose de fou, qui traine en arrière plan. Sinon, comment expliquer cette approche singulière et cette volonté de nous embarquer dans ce cauchemar, synthétique, parfois assez glacial (certains passages amplifient franchement cette impression de froideur), révélant de lointains relents plus black, collant avec cette atmosphère bien poisseuse et ce côté malsain.
Le chant est là aussi un peu singulier. Si on retrouve un chant guttural, le choix est porté sur une sorte de chant étouffé, qui ajoute à ce côté synthétique. Il recèle divers aspects, dont certains abordant des phases plus proche d'une rencontre entre déclamatif et slam. Le rythme du chant est assez soutenu, amenant aussi une approche malsaine à travers ce biais.
Le son est très intéressant. Si on entend clairement tous les instruments, malgré un choix de textures sonores qui joue entre le côté synthétique et une approche abrasive, il est à noté que la guitare va, à l'instar de la basse, avoir des moments où elle aura plus d'importance, suivant les besoins des titres. Le traitement de la basse amène son rôle à évoluer dans un spectre qui change sa nature mais pas son essence. Le côté synthétique se retrouve en partie dans la batterie, qui a un son particulier, un peu raw et live mais qui appuie du coup l'ambiance singulière de l'album.
Ce premier album de Grandiosa Muerte est très sympathique, nous plongeant dans un univers sombre et malsain, portant une approche singulière qui va titiller des styles venant en renfort de son approche un peu à part. C'est du death efficace, malsain, qui envoie sévère. Le traitement peut au début surprendre mais la cohérence explose rapidement et on plonge avec plaisir dans ce cauchemar malsain, assez jouissif. A découvrir!