top of page

Dystopies

Antechaos

Autoproduction

16 décembre 2024 à 16:25:09

Dématérialisé

2024

13 titres pour 49'34''

Une petite vidéo:

Antechaos est un groupe du Grand Est formé en 2020 et géniteur d'un premier album 'Apocalypse' en 2022. Le groupe navigue entre hard rock et heavy metal, pour faire simple. Le nom n'évoque pas vraiment ces styles (j'aurais vu plus du thrash) et je ne suis pas un grand amateur du genre.

Le premier titre, 'Memento mori', sert d'intro et place une ambiance, en s'accompagnant d'une narration qui va à l'essentiel, résumant notre monde. Jusqu'au moment où le chant arrive, avec ce genre de chant qui me laisse de marbre, ultra mélodique. Le tout posé sur une belle mélodie très calme. Honnêtement, je ne savais pas si j'aurai la volonté d'aller au bout de l'album. Car ici, même si le titre est bien foutu, c'est dans ce que j'apprécie peu. Puis le deuxième titre arrive.

Et là... Ben... comment dire... Et bien le groupe offre avec 'Renaissance' un titre très catchy, avec un chant toujours avec un aspect mélodique mais plus agressif, posé sur une musique clairement puissante et bien pensée, mêlant hard rock et heavy, les deux styles s'entre-mêlant complètement. Le titre montre aussi la puissance de la section rythmique, avec une batterie aux patterns variés associée à une basse bien présente, offrant quelque chose de plutôt gras. Elément auquel je ne m'attendais pas. Le titre est entrainant, bien ficelé et arrive à me faire écouter des aspects qui m'emmerdent habituellement (les cœurs aigus, que je range dans un style que je qualifie de metal tapette (voix trop aigues, clichés mortels...), m'emmenant dès le début dans l'aventure de l'album.
Et ce qui arrive ensuite est un système d'engrenages infernales qui m'embarque sur la totalité de l'album. Et ce, pour beaucoup de raisons, que je n'énumérerai pas ici car ce serait fastidieux et trop long. Mais principalement, le groupe avance déjà avec des titres très structurés, pouvant être surprenant, efficace et amenant de la variété dans le fond et la forme. D'autant que la paire basse / batterie apporte vraiment un côté uppercut surprenant, servant de squelette à des titres pouvant être complexes sur certains aspects.

La structuration des titres est assez variée, se basant sur l'aspect hard rock / heavy metal, jouant avec les codes des genres mais amenant aussi des moments où d'autres styles viennent se joindre à la fête, notamment par la section rythmique ou certains riffs, plus profonds et agressifs, évoquant du thrash, sans le moindre doute. Et avec ça, ça devient intéressant car le groupe utilise non seulement les codes des genres mais aussi les passerelles qu'ils ont en commun. C'est vraiment sur la partie rythmique que c'est flagrant, naviguant entre ces trois styles pour le fond. Et cela joue sur les tempos qui en deviennent très variés.
Cela entraine des titres pouvant offrir une certaine lourdeur (liée à la tonalité mais aussi le choix de ralentir certains passages), des accélérations (oscillant ainsi du hard rock au thrash voire même à quelque chose pouvant évoquer du space rock ou d'autres styles, de manière subtile) ou une complexité dans les changements, jouant alors aussi bien sur le fond ou l'atmosphère. C'est assez ambitieux mais cela fonctionne complétement. On a des titres qui vont aussi proposer un mid-tempo carré que des cavalcades qui m'emmènent au cœur de l'album. Il y a certains passages qui donnent envie de taper du pied (ou sur ton volant en voiture, comme un con), preuve d'efficacité.
La structuration offre beaucoup de variétés et des changements (voire même quelques breaks inattendus, ici et là), même si certains passages m'accrochent moins que d'autres, notamment sur un ou deux titres où le tempo est nettement plus lent, se rapprochant d'une sorte de ballade étrange. Plutôt déstabilisant musicalement mais cohérent avec le concept que développe l'album, offrant une plus une continuité de tonalités et de tessitures. C'est dense, très riche mais ne laisse pas de place à un ennui dû à une hypothétique saturation. Rien de tout cela, c'est très à l'opposé même.

Musicalement, le groupe garde un cap, s'offrant néanmoins des circonvolutions de part et d'autre qui restent logiques avec l'ensemble de l'album, celui-ci étant cohérent de bout en bout. Il y a clairement l'élément mélodique qui fait son effet, sur différents titres et ce, dès le début. Cet élément offre différents aspects, aussi bien très calmes que revêtant des oripeaux plus agressifs, sans être en décalage total. Là aussi la cohérence est bien présente et cela engendre des titres à la puissance mélodique étonnante. Un exemple de tout ça ensemble est le titre 'Les vertueux'. La section rythmique est très carré, avec une structuration relativement agressive, qui glisse vers des mélodies en deux ou trois mesures, le tout avec beaucoup de fluidité. C'est très bien pensé.
Et cela amène l'art des transitions que le groupe développe au sein des titres, créant une trame solide sur la totalité de l'album et qui permet au groupe de pouvoir jouer sur un aspect plus retors et plus complexe: on retrouve des codes des titres qui sont élaborés de manière plus globale sur la totalité de l'album. Cela ouvre des sections plus importantes où d'autres apparaissent, créant une sorte de strate ou hiérarchisation, que l'on retrouve dans les titres ou les thématiques.

Et les textes, en français, ne sont pas des textes bateaux. Il y a une grosse réflexion derrière, un travail qui permet de jouer sur des aspects différents, permettant d'aborder des thèmes variés (l'écologie, les dérives technologiques, la fuite en avant vers un futur inadéquate...) qui font le lien avec différentes dystopies qui pourraient ne pas l'être et être des réalités possibles, nous éloignant des poncifs. Mais cela va aussi plus loin, nous interrogeant sur notre rapport à notre monde et époque, à notre nature même. Il y a une portée philosophique subtile car n'étant pas jeter de manière frontale. La subtilité est réelle, en toute logique du reste.
Les textes sont associés à la musique de manière très imbriquée, l'un étant le support de l'autre, jouant sur le chant, les tonalités ou les sonorités. Le placement n'est pas hasardeux mais correspond lui aussi à une réflexion accrue, allant bien au-delà des styles que le groupe touche ou effleure. Rien n'est laissé au hasard, clairement.

Ce qui nous amène au chant. Et là, Laurent fait fort: si la base est un chant axé hard rock / heavy, il offre globalement un chant plutôt agressif (même dans les passages les plus mélodiques), en relation avec la couleur de la tonalité de l'album, plutôt sombre. Mais il ne se focalise pas sur ces seuls styles et offre des moments parfois plus intense, pouvant lancer un chant plus guttural, plutôt thrash à l'ancienne ou au contraire, quelque chose qui serait plus dans un esprit space rock / psychédélique. Il y a beaucoup de travail sur le chant, tout comme son placement dans les titres, celui-ci étant assez crucial.
Le son est excellent. Puissant, massif mais savant être plus fin et subtil au besoin, pour les aspects plus mélodiques. Il y a aussi un travail sur celui-ci, car les arrangements ne sont pas anecdotiques ou juste du décorum. Il y a une volonté d'offrir une immersion. Les instruments sont tous bien présents et l'accent est mis sur la basse (bien présente) et la batterie, cœur de la musique. Les guitares offrent des tonalités et des tessitures différentes. Il y a un jeu avec elles d'ailleurs, dans la construction des titres et du son. Le chant est à niveau, bien compréhensible, sans effort.

Un très bon album dans un genre que je fréquente peu et que je vous recommande chaudement! Car bien foutu et efficace!

bottom of page