Brutta est un trio brésilien de Sao Paulo qui vient de sortir son premier album éponyme. Le trio œuvre dans un blackened death très direct, véhiculant à la fois de la brutalité et des pans développant un coté plus atmosphérique / ambient, servant d'amplificateurs à leur base.
C'est très direct, avec un choix de tempos rapides, ayant de rares moments où le groupe va plus se poser, amener un ralentissement (ne paniquez pas, c'est bref), qui, par contraste, amplifie la virulence de leur musique. Il y a clairement ce coté particulier des groupes brésiliens qui marque aussi, cette patte à part, qui est identifiable. L'album porte en lui cet ADN singulier, utilisant des fulgurances et autres biais pour imposer une violence contenue.
Le trio n'y va pas par 4 chemins et file dans le gras, imposant ce rythme dense et soutenu, mettant en avant aussi bien de la technique que la brutalité. Mais de façon constructive car le trio dévoile rapidement un aspect mélodique, qui vient contraster furieusement avec le reste et qui pourtant, s'avère indissociable du tout. C'est même inattendu car cette approche s'avère désarçonnante un instant puis on comprend rapidement que c'est la méthode du groupe. Et ce coté mélodique, qui se dévoile à travers le prisme de riffs plutôt efficaces mais mettant en avant un certain esthétisme, vient parfois construire une sorte de muraille où vient s'appuyer la trame de base, virulente. Et c'est là que le groupe balance une carte maitresse: des moments où il y a quelque chose qui développe des ambiances.
Ces ambiances, qui évoquent plutôt le black du coup, prennent le soin de créer des trames qui s'ajoutent à la violence. Il y a un coté ambient qui peut apparaitre (très étonnant mais diablement efficace), posant quelque chose qui est alors à la limite de l'atmosphérique et de l'ambient et reposant pourtant sur un postulat brutal. Et dans ces moments, le trio peut amener un coté mélodique, qui va alors s'affirmer, paradoxalement en se mêlant à des plans violents et rapides. Et qui amènent une structuration avec les quelques changements de tempos qui s'imposent. Et l'on se retrouve ainsi parfois avec des moments de pures bravoures (par exemple sur 'Fragmntd', avec cet improbable construction où tout se mêlent et s'affranchit de la base blackened death, tirant vers quelque chose d'autres, comme une sorte de féérie malsaine.
Car oui, même si ambiances et mélodies se présentent, c'est toujours avec une approche malsaine, issant de divers gimmicks bien vus (des chœurs, des sonorités altérées, des dissonances...) qui vont puiser dans l'esprit du black et se lier à ce death bine dense qui habite le disque. Et cela se ressent par des riffs très agressifs, mettant en avant un coté abrasif et rouleau compresseur, ainsi qu'un esprit plus obscur, puisant là aussi dans le black (avec un coté plutôt blasphématoire) mais aussi le death, notamment du coté de Morbid Angel (d'ailleurs, les éléments ne sont pass sans évoquer le groupe). Et les sections rythmiques, avec ce coté percutant développé évoque une approche entre Morbid Angel et les délicats Bloodbath. Autant vous dire que c'est plutôt très carré, avec un coté martial, imposant un rythme soutenu, sans vraiment de temps morts (en plus de certains codes très spécifiques).
Le trio offre une certaine modularité dans sa musique, offrant de la variété dans la brutalité, celle-ci pouvant se muer en quelque chose de plus lourd et poisseux, jouant sur les codes établis par le groupe, de façon brêve. C'est bien vu là aussi, car ça évite une impression de redondance et surtout, ça étoffe leur musique, en même temps qu'un apport de densité apparaît.
Le chant est sur une base très death, faisant quelques incursions dans une trame black, de façon brève. Certes il n'offre que peu de variété mais colle complément avec la musique que le groupe nous dévoile. L'un des appuis essentiels est l'apport des chœurs, qui apportent ce coté malsain, un certain malaise, dans les moments plus atmosphériques.
Le son, quand à lui, ne fait pas dans la finesse. C'est très massif et pourtant très soigné. La basse est omniprésente, apportant vraiment quelque chose dans l'aspect malsain, du fait de sa tonalité et de sa place que le groupe lui donne. La batterie offre aussi toute sa gamme à nos oreilles. Tout ça grâce aux arrangements et à un mixe maitrisé, ayant pour but de délivrer un album massif et de qualité.
Brutta offre un premier album, dans la tradition brésilienne. Il s'adresse aux fans de musique violente, structurée et recherchant quelque chose d'abouti ou qui fait travailler les neurones à l'écoute (avec le plaisir de l'écoute bien évidemment). Très bon premier assaut!