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Annihilation

Faction Senestre

Mors ultima ratio

28 novembre 2023 à 15:28:07

Vinyle

2023

6 titres pour 37'56''

Une petite vidéo:

Faction senestre est un one man band toulousain officiant dans un registre singulier peu courant se rattachant à l'industriel et au spoken words. Donc, d'office, on se dit qu'il y a du sujet derrière, qui plus que le sens du mot senestre signifie à gauche (pas nécessairement lié à une mouvance politique). D'emblée, à expliquer plus c'est compliqué, l'écoute est la meilleure de toutes. Il s'agit du deuxième effort du projet.

La base musicale est un industriel très froid, synthétique, qui se focalise sur deux aspects: des sonorités répétitives, redondantes, plaçant d'emblée le projet dans un aspect qui renvoie à l'inhumanité des machines et des rythmiques vraiment singulières où la lourdeur prime, avec un côté là aussi froid et irrégulier. Cela nous emmène dans un paysage sonore sombre, pouvant peut être en déstabiliser quelques uns, surtout que la musique développe, dans ces circonvolutions lentes, un sentiment de malaise, que quelque chose se terre, prêt à bondir. Mais avec un rythme volontairement pesant et où les rythmiques vont évoquer très rapidement un pouls. Et cela restera vraiment un des gimmick de la musique et qui amène ainsi, discrètement, un aspect étonnamment organique, renvoyant à l'idée que l'on est dans un corps désincarné, inhumain mais pourtant vivant.
On est vraiment cette fois aux confins de l'industriel, flirtant avec une sorte de bruitisme réfléchi et résolu, tout en lenteur et lourdeur, qui transcende les repères et va offrir une étrange atmosphère qui se module sur la totalité de l'album, même si certains éléments se répètent, ajoutant au malaise. Malaise qui va s'articuler autour des gimmicks et de l'approche à mi-chemin entre machine et vivant. C'est sombre, déshumanisé et livrant parfois une approche triste, sous forme d'une certaine léthargie. C'est fait volontairement pour poser un malaise ou quelque chose de gênant, puisant dans les tréfonds de l'âme torturé de l'humanité. L'ajout de quelques samples, ici et là, nous enfonce encore plus dans un univers sombre, tout en offrant quelque chose de différent, que la musique seule ne peut expliquer. Car celle-ci sert d'écrin à des textes en français.

Et c'est là que réside le cœur du projet: sous forme d'une litanie, on a une analyse de la situation de notre monde, de ce qui ne va pas, de ce qui foire. Mais qui va aussi casser le quatrième mur car le gars derrière Faction Senestre va t'impliquer dans les textes, te poser des questions, éventuellement te faire te remettre en question, à travers des mots choisis, dont certains très puissant et apportant une pertinence marquée.
On a une analyse critique de notre monde et surtout par l'angle sociétal, entre les mains travailleuses et ceux qui les méprisent, glissant l'idée d'avancer malgré les difficultés. Et c'est là que la musique fait sens, l'ambiance véhiculée servant à appuyer les textes et les évocations.
C'est résolument sombre car cela permet de glisser un message en second plan qui amène une forme de positif. Mais aussi une approche poétique, à travers ce constat sombre car les textes ont, au-delà de leur puissante évocation, dégage une approche réfléchie où chaque mot est posé, avec la rhétorique que chaque mot à un sens. C'est extrêmement étrange car cela crée une sorte de décalage, qui est logique dans l'ensemble, glissant une cohérence à laquelle on ne s'attendrait pas au début.

Evidemment, on est sur quelque chose qui est vraiment difficile à expliquer, si tu ne te penches pas sur les textes et l'association faite avec la musique. Car Faction Senestre tient plus d'une entité musicale qui va s'immiscer dans notre réalité, prenant une forme concrète d'un aspect plus abstrait. C'est un constat mais c'est aussi une analyse qui apporte aux problèmes évoquées des pistes à suivre pour des solutions ou même une remise en question du fonctionnement de notre société. C'est puissant dans le genre, profond et va forcément te faire réfléchir.

Parler du chant ne fait pas sens, puisque l'on a des textes déclamés. Le son met en avant les textes et la voix, la musique un peu en retarit servant de support et d'écrin au contenu des textes. Alors, là on est sur quelque chose que seules les personnes les plus curieuses et ouvertes seront tentées d'explorer. Mais l'exploration vaut le coup, de par le message dans la noirceur est finalement plus modulée que l'on pense.

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