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A tout jamais

Hidden in eternity

Autoproduction

27 avril 2024 à 10:27:33

Dématérialisé

2019

6 titres pour 48'04''

Une petite vidéo:

Hidden in Eternity est un groupe formé en 2001, naviguant dans un registre sympho doom goth black. Un album est sorti en 2005 (On the ninth day) avant une pose en 2008. En 2017, la machine se relance, avec un album qui sort en 2019, qui est celui qui nous intéresse ici. On change clairement de registre, passant à un funeral doom death de bon augure.

6 titres constituent l'album. Sur la totalité des titres, 4 dépassent allégrement les 9 minutes, allant même titiller les 13 minutes. Ce qui est logique pour le style et qui permet de placer une atmosphère très baroque, voire macabre parfois, avec beaucoup de finesse et de subtilité. Car dès le début, il est clair que le groupe prend le temps de poser cette ambiance, qu'il va développer avec des éléments intéressants que je développerais un peu plus loin.

Structurellement parlant, l'appuie est fait sur la lourdeur, parfois abyssale, que le groupe va cultiver, amplifiant de fait l'approche funèbre et macabre. Toute joie est interdite, la tristesse et la mélancolie déferlant comme un tsunami de boue qui prend son temps. Le rythme est très lent du coup, jouant sur le temps, que ce soit en matière de structures ou de durée. C'est l'une des clés qui se dévoilent très rapidement, offrant une accroche qui s'opère directement (du moins si tu apprécies ce genre, dans mon cas, ça fonctionne très bien). Les structures jouent vraiment sur cet aspect poisseux, triste, apportant de la matière à l'atmosphère sinistre que le groupe déploie.
Et à ca, il ajoute de manière parcimonieuse des éléments purement doom death (outre le chant), qui apportent une soudaine et brève accélération, donnant un contraste qui apporte de la texture et vient moduler la mélancolie du tout, glissant aux milieux des regrets qui s'égrènent une sorte de colère sous-jacente, marquant ainsi plus nettement le côté funèbre qui lui est lié. Cela apporte aussi un jeu sur des structures qui vont jouer sur un aspect miroir déformant, glissant une sorte de malaise en plus de toute la mécanique macabre et funèbre.
Il y a d'ailleurs un travail sur cet aspect doom death, qui joue avec certains codes et 'Si je ne devais en tuer qu'un déploie une évocation de Haemorrhage (sur 'Morgue sweet home' de mémoire, avec ce passage lent, au violon où l'atmosphère rejoint celle du titre de Hidden in eternity) mais place aussi une importance sur le mécanisme musicale de l'aspect funèbre. Il y a vraiment une structure parallèle qui se dessine, servant de nappe d'atmosphère mais aussi de trame, allant plus loin que le simple rôle de créer une ambiance. C'est presque un membre du groupe dans la musique, qui nous accompagne dans cet univers funeste. L'usage d'un violon est d'ailleurs un élément fort, très intéressant car nous plongeant totalement dans cet univers.
D'ailleurs, attention, quelques passages très lourds seront dangereux pour tes cervicales, installant une sorte de break down incroyablement profond (et qui amène des perspectives rythmiques intéressantes et variées pour le coup, même si dans la même lignée musicale).
L'essence du doom death n'est pas sans me rappeler les doom death des années 90 et plus particulièrement Cadaverous condition, avec ce ton particulier et que recoupe Hiddden in Eternity, lui permettant de nous ancrer sur deux périodes différentes en un seul moment. Ce qui lui permet aussi d'accentuer le travail et le jeu sur la temporalité, que ce soit musicale ou dans la manière d'amener son univers.
Le groupe tisse d'ailleurs une seconde trame qui joue avec les codes du funeral doom et du doom death, appuyant les ressemblances et associant les différences, jouant sur les tessitures et les textures que les styles offrent. Et c'est une logique que le groupe crée, offrant une cohérence en même temps qu'une approche singulière, plus volatile. Et c'est là qu'il faut évoquer le couple basse- batterie, qui est un élément central pour les structures, servant d'axe pour la musique mais aussi le côté atmosphérique qui s'exhale de l'album.

Le groupe distille ainsi un rythme lent, lourd et travaille sur un aspect lancinant, qui vient se graver dans ta cervelle, devenant une ritournelle plutôt vicieuse mais diablement efficace, qui se révèle être indissociable de l'ensemble, créant une architecture singulière, plutôt oppressante. C'est là que deux autres éléments prennent place, ouvrant une autre perspective. Deux titres sont de courtes durée. Si 'Grafin von Todeskampf' cloture l'album, 'les échappées extatiques' amènent un moment de répit, changeant le prisme de l'atmosphère. Il reste toujours cette dynamique funèbre mais ici instrumental (comme le dernier), apporte une approche chargée de plénitude, montrant que le funèbre n'est pas nécessairement un flux non stop de sinistre et qu'il recèle de différentes facettes.
Outre ce que j'évoquais de l'ambiance d'un titre d'Haemorrhage (du moins la fin de celle-ci, qui prend aussi un temps de développement, d'où mon parallèle), il a une dimension mélodique qui habite le funeral doom de Hidden in Eternity. C'est indéniable et cela sert de point d'ancrage à quelque chose de plus fort, qui oblige l'auditeur à le reconnaître: les émotions que développe l'album sont très puissantes, jouant sur une carte émotionnelle particulière, qui s'appuie sur la mélancolie, la tristesse et le souvenir. On a vraiment une exploration de ce côté particulier, qui lie la musique au monde des funérailles, avec tous ce qui le constitue.
C'est là aussi un travail marqué, servant de catalyseur à la musique mais aussi de biais qui va chercher à aller plus loin que la musique et donner clairement corps à une entité et une personnification. Il y a vraiment une volonté de nous faire percevoir de manière palpable la musique que déploie le groupe.
Le groupe se base aussi sur un violon et un clavier, ce qui renforce à la fois l'aspect funèbre tout comme le côté mélodique qui leur permet d'avoir un esthétisme singulier très prenant. Le violon sert en partie de catalyseur, permettant parfois à la musique de se construire autour du violon, prenant alors un rôle plus centrale, servant parfois de structures secondaire. Et le clavier vient de manière discrète appuyer l'atmosphère mais aussi certains éléments émotionnels qui jonchent de manière plus nette certains pans de l'album.

Le chant est souvent guttural, avec quelques écueils clairs. Les paroles sont en français ou en allemand (renforçant le lien temporel avec le doom death des années 90 et du fait, mon lien avec Cadaverous condition). Le chant se pose lentement, parfois presque égrené par syllabe, jouant clairement sur la temporalité de nouveau. Ce qui me renforce dans mon idée que la temporalité à une importance particulière mais aussi que le chant est lui aussi un élément catalyseur pour la musique. On a quelque éléments vocaux qui s'appuie juste sur la voix claire, sous forme de chœurs, renforçant la mélancolie des titres mais aussi une approche quelque part entre cinématographique.
Le son est excellent. Il suit l'atmosphère particulière de l'album, avec une basse bien présente, servant de point centrale pour la lourdeur, sur laquelle les guitares viennent en strates supplémentaires. Le son suit cette atmosphère et offre une puissance étonnante, jouant sur la musique mais aussi les émotions qui habitent l'album. La manière dont le violon et le clavier sont amenés permet au groupe de pouvoir allez plus profondément dans son approche et sa gestion du son et par ricochet, celle du temps. L'équilibre des instruments est intéressant, une polarisation existant avec les titres instrumentaux. Cette polarisation rejoignant de nouveau cette notion de temporalité. Le chant se place dans la hauteur du son plutôt gras, accentuant le côté funèbre, jouant avec le doom death pour ce point. Parti intéressant car permettant au groupe d'offrir un travail marqué sur le son, par le mixe et les arrangements.

Hidden in Eternity est une excellente découverte en ce qui me concerne. Grand merci à Néréïde de m'avoir contacté car c'est une pépite du genre que le groupe nous offre et que je vous recommande chaudement.

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