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[B.o.S]2.0

Bowels of suffering

Fantai'zic production, WormHoleDeath

8 mai 2025 à 09:08:22

CD

2024

14 titres pour 47'33''

Une petite vidéo:

Bowels of suffering est un groupe français formé de membres venant de divers groupes comme AkromA, Dusk of delusion, Symakya ou encore Benighted Soul. En se fiant au nom et en regardant rapidement l'artwork, sans trop y prêter d'attention, je m'attendais à du death. Mais en mettant en lecture, surprise, ça n'a rien à voir. Je me suis retrouvé face à un metal industriel chanté en français. Et on ne va pas se mentir, on a affaire à du très bon, avec un concept réfléchi, qui plus est en français.

On va poser le concept, avant d'explorer plus loin l'album, si tu le veux bien (de toute façon, c'est moi qui écrit alors...): Gaïa est morte, tragique disparition due à l'avidité humaine et fait s'assumer, à titre posthume, sa vengeance via la faune sauvage, leur accordant une conscience. Comprenant rapidement leur incapacité à détruire la race humaine, ces derniers ont alors détourné de l'homme sa création, à savoir des cyborgs. Le but étant de créer une nouvelle race pour détruire le genre humain.
S'en suit une guerre meurtrière et els hommes comprennent qu'il faut évoluer ou périr. En se servant ce ceux qui ont été coupés de leur nature sauvage depuis longtemps: les animaux domestiques pour créer une nouvelle race de combattants.

Avec le concept posé, on a déjà un côté sombre qui s'expose, en plus d'avoir ce ressenti à travers la musique, portant une sonorité puissante et sombre elle aussi. Et c'est un élément commun aux titres qui marque l'album, s'accompagnant d'autres éléments. La part de l'indus se développe par des claviers, des structures rythmiques propres au genre et un jeu de sonorités. Il y a un côté synthétique omniprésent, lié au genre mais qui, suivant les titres, est dosé de manière intelligente.
C'est indéniablement de l'industriel, avec les codes inhérents au genre, que le groupe exploite musicalement mais aussi à travers les textes, faisant référence à la technologie, à la guerre et à une vision assez apocalyptique d'un monde cyberpunk qui s'est méchamment rétamé. Le groupe opte pour une rythmique ayant souvent un aspect martial, laissant libre court, ici et là, à quelques exubérances plus violentes. Il y a aussi une part nette de moments plus lourds ou plus lents, appuyant les atmosphères et textes sombres de l'album, qui permet au groupe de pouvoir ancrer plus fort l'aspect industriel mais aussi de se laisser la porte ouverte à des choses différentes.
La musique, de manière globale, développe, en plus du côté synthétique, un aspect assez rugueux, parfois nettement abrasif sur certains points cruciaux, servant aussi bien de liaison que de points de bascule. Les titres développent des structures parfois assez complexes, servant à la fois la trame de l'album, son cheminement mais aussi l'ouverture sur ce qui est une sorte d'uchronie très sombre.
Le groupe soigne vraiment cette approche sombre, parfois sinistre, liée à la guerre, la mort de Gaïa et tout ce qui en découle, ouvrant un imaginaire peut reluisant mais très prenant (car les textes sont très présents, j'y reviens plus loin) et qui, surtout qui ouvre un élément propre au cinéma: la suspension d'incrédulité. Ce qui est fort, puisque le groupe ne peut se baser que sur sa musique, ses textes et les visuels. Et arrive donc à entretenir une cohérence très forte.

Le groupe fait aussi appelle à d'autres éléments au sein de sa musique, les structures renfermant d'autres structures de sphères différentes, amenant au passage une approche singulière du traitement industriel. Si on peut avoir parfois un ressenti qui regarderai vers une amorce cinématographique à de brefs endroits ici et là (et qui renvoient à la suspension d'incrédulité, tissant un lien entre les deux), c'est vraiment un parti pris avec un autre domaine musical que Bowels of suffering explore.
Le groupe introduit très nettement des passages et des structures venant de la musique classique, soit dans des passages volontairement orientés vers celui-ci (notamment dans la présence de Gaïa) soit en mêlant l'aspect industriel avec la musique classique, se laissant le loisir d'explorer diverses facettes et d'ouvrir des ambiances plus particulières au sein de l'atmosphère globale qui habille l'album. C'est aussi un moyen de tisser des liens au sein de la trame de l'album et de pouvoir, suivant les titres, marqués des éléments propres à l'histoire qui nous est narré que de pouvoir nous offrir une vision plus globale de l'ensemble, jouant avec les codes et proposant un rendu abouti. Et surtout qui offre une cohérence très marquée.
On retrouve dans les titres des liens entre certains, que ce soit par les textes, par des éléments musicaux, une approche dans les sonorités ou dans certaines structures très précises.

Cela fait que la musique développe aussi un aspect mélodique étonnant (qui n'est pas sans m'évoquer Dusk of delusion ('Neo divinity' entretien vraiment ce lien)), permettant de jouer avec un panel d'émotion et de contrastes. L'émotion est assez sombre, voire synthétique dans le gros de l'industriel et même déshumanisée. Il y a deux pôles marqués: le côté brut de l'humanité et celui, plus doux, de Gaïa (enfin de ses forces), offrant une polarisation qui, au fu et à mesure de l'album, va évoluer et se transformer, l'un devant l'autre pour mieux se fondre en quelque chose de plus complexe, à l'image de l'humanité mais surtout de la conscience et de ce qu'implique le concept de conscience. Mine de rien, le groupe apporte une dimension philosophique dans l'album, allant explorer des facettes auxquelles on ne s'attend pas, offrant une excellente surprise de chemins explorés. Toujours avec la cohérence lié au concept.
Cet aspect mélodique permet aussi de glisser des contrastes marqués avec les aspects purement industriel mais aussi de jouer sur une ligne plus floue où les repères, au fur et à mesure de l'album, vont devenir plus volatiles, s'ouvrant à ce qu'il y a autour de la guerre et appuyant là aussi des éléments philosophiques mais aussi plus psychologiques.

Les textes sont donc en français, nous plongeant avec aisance au sein du concept et du monde torturé de l'album. Chaque titre explore un aspect essentiel du concept, abordant différents point de vue mais aussi des vues transversales, au fur et à mesure de l'avancé de celui-ci. La vision des textes évoluent ainsi au fil de l'album, posant des regards différents et analytiques et nous servant aussi de guide au sein de cette uchronie. Le groupe va aborder des thèmes forts, parfois allant au-delà de la métaphore et pouvant questionner les croyances de l'humanité et de sa vision biaisée.
Les textes apportent un regard froid, synthétique, à la manière de l'indus, tout en offrant, en second plan, un aspect émotionnel puissant. Cela nous entraine du coup dans les méandres de l'album, à travers la trame torturée et qui permet au groupe de poser ce que j'évoquais: la suspension d'incrédulité. Les paroles étant clairement le vecteur qui remplace les images, jouant sur des moments narratifs, pouvant être contemplatif (souvent au sein des parties classiques) mais aussi posant une sorte de dialogue entre les deux entités se livrant bataille, sans oublier tout ce qui en découle et gravite autour.
Le concept prend le temps de présenter les deux camps, avec différents points d'ancrages. Les quatre premiers titres explorant la part humaine, avec son arrogance et sa suffisance mais aussi ce qui en fait sa fragilité et engendre ses pires aspects. Les cinq titres suivant sont orientés vers l'armée de Gaïa, avec un angle regardant à la fois les traumas des transformations (physiques, psychologiques mais aussi, forcément, sociétales) et ce que le changement peut impliquer et joue avec le concept de Dieu - et son inexistence ou non. Mais un point de bascule se dessine, laissant les quatre titre suivant explorer les conséquences, les circonvolutions qui en découlent et va frontalement vers la démence, la folie explosant réellement ici.
Arès tout ça, le groupe laisse l'album finir sur l'instrumental 'Gaïa', clôturant en douceur l'album tout en balançant une dernière charge émotionnelle très puissante, à mi-chemin entre l'espoir et la noirceur.

Les textes sont portés par deux chants différents, livrant deux incarnations. Un chant masculin, plutôt agressif, jouant avec une modularité de la puissance, au timbre marqué, incarnant la part de l'humanité (et l'homme, dans ce qu'il a de plus vil). Il laisse la folie de l'homme s'exprimer mais aussi exposer sa vision tronqué du monde. Mais aussi, parfois, laisser transparaitre les fragilités de l'humanité (et ce, dès '618MT' nous plongeant directement dans la noirceur mais aussi la fragilité de la chair).
Le second chant est un chant féminin, plutôt vers une approche liée à la musique classique, oscillant aussi avec une approche plus metal symphonique. C'est l'incarnation de Gaïa, amenant de la douceur et un contraste avec le chant masculin. Mais la douceur du chant n'empêche pas parfois une vision plus guerrière, permettant à Géraldine de pouvoir offrir alors un chant où la puissance est présente.
Les deux chants se retrouvent souvent associés, en duo ou en opposition, jouant aussi parfois la carte d'une sorte de dialogue.
Des chœurs apportent de la profondeur, amenés de manière ponctuelles et judicieuse, pour ne pas nous faire perdre le fil.

Le son est excellent. Puissant, très propre, il permet de pouvoir profiter de tous les éléments constituants l'album. Il y a un traitement particuliers pour les claviers, qui sont à la programmation. La batterie en découle, celle-ci semblant être de la programmation (et qui colle complètement à l'aspect industriel du coup). La basse est audible, avec un peu d'attention (bien que parfois plus nette, pour mon plus grand bonheur). Les deux chants sont à l'équilibre, totalement compréhensibles. Les arrangements et les orchestrations sont une part importante de l'immersion que le groupe nous offre, du fait de la réflexion à leur place et leur emphase nécessaire.

Bowels of suffering livre un premier album avec un concept excellent. La puissance règne dans la musique mais aussi l'énergie et la part émotionnelle. Des titres vont se graver dans ta tête ('Deus x makina' ou 'In the name of God'), le groupe excellent avec les mélodies qui font mouches et le jeu des contrastes. Un premier album qui place la barre haute dans le genre, recélant de détails à découvrir. Gros respect! Un album à découvrir absolument!

© Margoth PDF

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